Olympe, une femme Libre !

Lorsque l’on évoque Olympe de Gouges, la première image venant le plus souvent à l’esprit est sa célèbre déclaration des droits de la femme et de la citoyenne publiée en septembre 1791.

Cette rédaction en elle-même est déjà une pierre remarquable dans l’édification du grand temple de l’histoire humaine en général, et particulièrement une première pierre d’importance au sein de la construction de la mixité et de l’égalité homme femme.
« La femme naît libre et demeure égale à l’homme en droits. […] Le but […] est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de la femme et de l’homme. Ces droits sont : la liberté, la prospérité, la sûreté et surtout la résistance à l’oppression. »

Mais l’apport et l’action d’Olympe de Gouges ne sont pas limités à ce texte, n’en déplaise à Alain Decaux et à celles et ceux qui ont laissé Olympe dans l’oubli, refusant d’ailleurs dans un premier temps sa Panthéonisation. Olympe de Gouges a œuvré par ses très nombreux textes, pièces de théâtre, manifestes, affiches, pour la République et l’égalité et aussi notamment pour la lutte contre l’esclavage et le droit des enfants mulâtres.

Et par ailleurs, c’est l’action politique par les mots et non par la violence létale qui a guidé, à chaque ligne, la plume acérée de cette autodidacte.

Olympe de Gouges n’était pas royaliste, pour autant elle a plaidé en faveur du refus de la décapitation du roi, sans l’absoudre pour autant (texte du 19 janvier 1793) :
« [mais] Si les brigands couronnés persistent dans leurs crimes, et refusent de reconnaître l’indépendance de la République Française, je briguerai l’honneur d’allumer la mèche du canon qui nous délivrera de cette famille homicide et tyrannique. »

Olympe était révolutionnaire et nous savons qu’elle n’était pas un soutien du clergé, pourtant elle s’est opposée vivement au massacre des prisonniers des 2 et 3 septembre 1792. « Le sang, même des coupables, versé avec cruauté et profusion, souille éternellement les Révolutions ».

Olympe était une femme dans un monde d’hommes, elle a constamment interpelé ses contemporains, s’attirant souvent les foudres de certaines femmes, elle le savait « Les femmes n’ont jamais eu de plus grands ennemis qu’elles-mêmes. Rarement on voit les femmes applaudir à une belle action, à l’ouvrage d’une femme ».
Elle exhortait les femmes de son temps à réagir : « Femmes, ne serait-il pas grand temps qu’il se fît aussi parmi nous une révolution ? Les femmes seront-elles toujours isolées les unes des autres, et ne feront-elles jamais corps avec la société, que pour médire de leur sexe et faire pitié à l’autre ? »

Elle n’a jamais gardé le silence face à ses nombreux opposants tel le Procureur de la commune de Paris, Pierre Gaspard Chaumette, qui lors de son procès, voulant que les femmes restent à la place que ces hommes avaient décidée pour elles, a osé déclarer : « [cette] virago, la femme-homme, l’impudente Olympe de Gouges qui la première institua des sociétés de femmes, abandonna les soins de son ménage, voulut politiquer et commit des crimes… Tous ces êtres immoraux ont été anéantis sous le fer vengeur des lois. […] Vous sentirez que vous ne serez vraiment intéressantes et dignes d’estime que lorsque vous serez ce que la nature a voulu que vous fussiez. Nous voulons que les femmes soient respectées, c’est pourquoi nous les forcerons à se respecter elles-mêmes. »

Olympe n’a pu que se défendre elle-même, avec panache, lors de son procès expéditif, le 2 novembre 1793, par un plaidoyer remarquable de panache et de courage, de ténacité dans ses convictions alors qu’elle savait risquer la décapitation :
« L’ignorance et la mauvaise foi sont enfin parvenues à me traduire devant toi : je ne cherchais pas cet éclat. Contente d’avoir servi, dans l’obscurité, la cause du peuple, […] il me fallait combattre la calomnie, l’envie, et triompher de l’ingratitude. Une conscience pure et imperturbable, voilà mon défenseur.
[…]
Pâlissez, vils délateurs ; votre règne passe comme celui des Tyrans. Apôtres de l’anarchie et des massacres, je vous ai dénoncés depuis longtemps à l’humanité : voilà ce que vous n’avez pu me pardonner.
En me précipitant dans les cachots, vous avez prétendu vous défaire d’une surveillante, nuisible à vos complots. Frémissez, Tyrans modernes ! ma voix se fera entendre du fond de mon sépulcre.
[…]
Les lois républicaines nous promettaient qu’aucune autorité illégale ne frapperait les citoyens ; cependant un acte arbitraire, tel que les inquisiteurs, même de l’ancien régime, auraient rougi d’exercer sur les productions de l’esprit humain, vient de me ravir ma liberté, au milieu d’un peuple libre. »

Elle s’écrie devant la guillotine : « Enfants de la Patrie, vous vengerez ma mort ! »
Elle avait alors 45 ans, nous étions le triste jour du 3 novembre 1793.

Marc Burlat