Par-dessus le maillet : transmission

« J’ai 98 ans. Je ne suis pas Franc-maçon mais j’ai été élevée dans les valeurs de la Franc-Maçonnerie. Mon père, né en 1897, était au Grand Orient de France (GODF). Ma fille, née en 1947, est devenue la Sœur de son grand-père, puisqu’elle est à la Grande Loge Mixte de France (GLMF) », évoque dans un large sourire Madeleine M.

Pour votre père, la période des années 1940 de l’après-guerre ne devait pas être facile en tant que Franc-maçon ?

En effet, pour les Francs-maçons de l’époque, il n’était pas évident de se réunir. Ils avaient des réunions informelles dans la plus grande discrétion. Si je suis au courant, c’est que ça se passait souvent à notre domicile à Nancy. J’entends encore mon père dire qu’ils « étaient en sous-effectif mais qu’ils avaient retrouvé le chemin du Temple sans jamais renier leur serment »

Regrettez-vous de ne pas avoir été vous-même Franc-maçon ?

Il ne faut pas avoir de regret mais si je devais en avoir un, ce serait sans doute celui de ne pas avoir été initiée. Par contre, j’ai été élevée dans l’esprit et les valeurs de la Franc-Maçonnerie. J’ai lu beaucoup de livres que mon père avait dans sa bibliothèque.
Il y a un peu plus d’une quinzaine d’années, je suis allée à plusieurs Tenues blanches ouvertes avec ma fille à Nice mais je considérais ne plus avoir l’âge.

Votre père a-t-il su que sa petite fille était Franc-maçon ?

Oui bien entendu. Il en a été très heureux. Il avait 88 ans et il a fait venir ma fille à la maison. Il lui a demandé de lui montrer son tablier et il l’a embrassé en lui disant « bienvenue ma Sœur, je veux te remettre ma canne de Compagnon, tu comprendras plus tard en poursuivant ton chemin et tu pourras peut-être transmettre aux générations suivantes ». C’était très émouvant et nous avions tous la larme à l’œil.

Propos recueillis par Nicole Guignard